LE KAUWBERG II
Introduction
Ce qu'on désigne sous le nom de Kauwberg II (ou Kauwberg
2ème partie) correspond à la zone située à l'Est de l'avenue Dolez, en face du
Kauwberg I: il est délimité au Nord par les jardins des maisons attenants à l'avenue
Dolez, à l'Est par les jardins des maisons des avenues Hoche et Bonaparte, au Sud par
l'avenue J. Pastur et à l'Ouest par l'avenue Dolez.
De par sa situation plus marginale et plus isolée que le Kauwberg I, le Kauwberg II
attire moins l'attention et est aussi moins fréquentée par les promeneurs. Pourtant ce
site est assez diversifié du point de vue botanique. Comme pour le Kauwberg I, cette
diversité résulte principalement des anciennes activités humaines et de la nature du
sol. Celui-ci est en effet identique à celui du Kauwberg I et a été exploité de la
même manière. On retrouve des sols sablonneux assez pauvres et du loess quaternaire. Le
sable a été exploité dans une carrière dont il ne reste qu'une relique dans la partie
Nord utilisée actuellement comme aire de dépôts de ferrailles et matériaux de
construction. Cette carrière a été en grande partie comblée par des terres de remblais
et par une décharge communale dans les années 1950 - 1960. De même, le limon
quaternaire fut exploité à la même époque que celui du Kauwberg I.
Le nom du lieu-dit 'Parc des Genêts' date de 1940 et avait
été donné par l'abbé Froidure à la zone longeant l'avenue Dolez occupée pendant la
guerre par ses colonies de vacances pour enfants défavorisés. Après la guerre, cette
partie du site a été remise en culture et ce jusqu'à la mort de l'agriculteur en 1985
('Kauwberg: visages d'hier et de toujours', 1991). Elle est actuellement pâturée par les
chevaux de Monsieur Hoed.
Juridiquement, ce site a également le statut de zone de
réserve foncière au plan de secteur. Comme nous l'avons signalé dans la partie
introductive, il ne fait pas partie de la zone classée, mais pourrait faire l'objet d'une
inscription sur la liste de sauvegarde du patrimoine. A défaut, il est utile de signaler
que dorénavant, tout site classé devra être entouré d'une 'zone de protection',
sorte de zone tampon, à l'intérieur de laquelle les travaux et les actes de nature à
modifier les perspectives sur le bien relevant du patrimoine immobilier ou à partir de
celui-ci seront soumis à l'avis de la Commission des Monuments et Sites. En ce qui
concerne le Kauwberg, cette zone n'a pas été définie au moment du classement mais devra
l'être prochainement. Il serait évidemment très souhaitable dans cette éventualité
que le Kauwberg II (ainsi que la partie non classée du Kauwberg I) soit inclus
intégralement dans cette zone de protection.
L'intérêt écologique (Dossier d'acquisition, IBGE,
1990) réside principalement dans la présence simultanée des divers stades de la
succession végétale sur substrat sablonneux sec: on trouve plusieurs types de friches
sèches, à divers stades de reboisement. Il n'y a pas de zone humide.
Si du point de vue botanique le site est à présent bien connu, l'aspect zoologique n'a
jamais fait l'objet de recherches approfondies. Ce serait une lacune à combler dans
l'avenir.
Il est certain que ce site ne peut être séparé du
Kauwberg I, il constitue un complément indispensable, différent et plus 'sauvage'
dont l'intérêt didactique est par conséquent très élevé.
Nous présentons successivement dans ce qui suit, une
description de la flore et de la végétation reprise de la synthèse des travaux 'Espaces
verts prioritaires', dans le cadre de l'étude de l'Environnement Bruxellois
(VANCRAENENBROECK et al., 1993), et du Rapport d'excursion de 1990 (document I.B.G.E.),
une carte d'évaluation biologique-écologique (carte n°9) et
enfin un carte d'affectation avec des propositions concrètes de gestion et d'aménagement
(carte n°10).
Etude de la flore et de la végétation
Sur la carte n°7, nous avons
représenté la végétation générale du site telle qu'elle apparaissait sur la photo
aérienne de 1991. On y distingue essentiellement trois zones: la grande prairie pâturée
et faiblement amendée occupée par les chevaux et longeant l'avenue Dolez; trois friches
à hautes herbes et ronciers d'étendue variable et une large aire boisée ou
semi-boisée. Pour être complet, mentionnons dans le nord du site le reste de l'ancienne
carrière et une petite zone à potagers jouxtant un ancien verger à griottiers (Prunus
cerasus). Cette carte ne reflète pas la grande diversité des associations végétales,
notamment celles des diverses friches arborées: la carte n°8
donne la localisation des différentes unités de végétation (les symboles sont les
mêmes que ceux utilisés pour le Kauwberg I).
Su: saulaie rudéralisée
Dans deux endroits, l'un situé le long de l'avenue Pastur, l'autre au milieu du
site, on trouve une saulaie d'origine récente: outre le saule blanc (Salix alba) et le
saule marsault (Salix caprea) comme espèces dominantes, on y note d'autres espèces
pionnières comme le bouleau verruqueux (Betula pendula), le robinier (Robinia
pseudacacia), le peuplier tremble (Populus tremula) et des espèces plus sylvatiques comme
le frêne (Fraxinus excelsior) et l'érable sycomore (Acer pseudoplatanus).
Le tapis herbacé est constitué d'espèces banales de friches rudérales plus ou moins
nitrophiles telles la grande ortie (Urtica dioica), le gaillet gratteron (Galium aparine)
et la verge d'or du Canada (Solidago gigantea).
Ru: robiniaie rudéralisée
Ce peuplement est très proche du précédent mais on y note la dominance du
robinier. D'autres essences cohabitent: le sureau noir (Sambucus nigra), l'aubépine à un
style (Craetegus monogyna), le cerisier tardif (Prunus serotina) et le coudrier (Corylus
avellana). Aux endroits où le couvert forestier n'est pas trop dense, apparaissent aussi
la renouée du Japon (Reynoutriajaponica) et la verge d'or (Solidago gigantea).
Rn: bois de recolonisation récente
Rn/Kt: idem sur talus
La majorité des zones boisées du Kauwberg II appartiennent à cette unité.
La strate arborescente est assez variée et comprend encore localement une assez grande
abondance d'espèces à croissance rapide comme le robinier (Robinia pseudacacia), le
peuplier tremble (Populus tremula), le bouleau verruqueux (Betula pendula) et le saule
blanc (Salix alba). Mais on trouve aussi des espèces préforestières comme l'érable
sycomore (Acer pseudoplatanus) et le sorbier des oiseleurs (Sorbus aucuparia), et des
espèces typiquement sylvatiques comme le chêne pédonculé (Quercus robur), le frêne
(Fraxinus excelsior) et le charme (Carpinus betulus).
Le taillis reflète la même évolution et donc la même diversité. On y rencontre le
sureau noir (Sambucus nigra), le cornouiller sanguin (Cornus sanguinea), le cerisier
tardif (Prunus serotina) parfois très abondant, et la symphorine (Symphoricarpos albus)
espèce introduite qui prolifère localement.
Le tapis herbacé comprend encore pas mal d'espèces de milieux ouverts: la berce commune
(Heracleum sphondylium), le liseron des haies ( Calystegia sepium) et la tanaisie
(Tanacetum vulgare).
Dans quelques localités on relève des espèces plus forestières comme le lierre (Hedera
helix), espèce de mull, et la scorodoine (Teucrium scorodonia) espèce qui affectionne
des sols plus acides. Les éclaircies sont envahies d'épilobes en épis (Epilobium
angustifolium), de ronces (Rubus sp,) ou de massifs denses de renouée du Japon
(Reynoutria japonica).
Kp: parc à caractère de forêt brabançonne
Il s'agit d'une plantation relativement ancienne (30 à 50 ans d'après
l'I.B.G.E.) assez hétéroclite, d'essences indigènes et exotiques. C'est ainsi qu'on a
de grands chênes rouges d'Amérique (Quercus rubra), des érables sycomores (Acer
pseudoplatanus) et des bouleaux verruqueux (Betula pendula ).
Le taillis est constitué de sureau noir (Sambucus nigra) et de cerisier tardif (Prunus
serotina).
La strate herbacée est très réduite du fait du manque de luminosité. Seuls le lierre
(Hedera helix), des ronces (Rubus sp.) et la fougère mâle (Dryopteris filix-mas)
supportent cette pénombre.
Ls: peupleraie sur terrain sec
Des peupliers (Populus nigra ssp pyramidalis) ont été plantés dans la partie
centrale du site. Ils y cohabitent avec des espèces indigènes.
Le sous-bois est constitué d'espèces nitrophiles banales. Mentionnons toutefois la
présence de la ficaire (Ranunculus ficaria), seule plante vernale observée, ainsi que
plusieurs pieds de l'orchidée Epipactis helleborine.
Hp: prairies pâturées
Comme nous l'avons signalé plus haut, cette prairie est relativement récente
puisque jusqu'en 1985, cette parcelle était cultivée. Actuellement, trois chevaux y
pâturent toute l'année, la prairie est irrégulièrement amendée. Elle se caractérise
par la grande abondance des renoncules (Ranunculus acris et Ranunculus repens).
Quelques pieds de sureau noir (Sambucus nigra), d'aubépine (Crataegus monogyna) et
d'églantier (Rosa canina) apparaissent également et augmentent la valeur paysagère
visuelle du lieu.
Sa + Ss: friches postculturales en mosaïque avec des
ronciers
Il s'agit d'une ancienne pâture à l'abandon: on y trouve à la fois des
graminées anthropiques telles que la houlque laineuse (Holcus lanatus) et le fromental
(Arrhenaterum elatius), des espèces témoignant de l'ancienne occupation du sol telles
que la grande oseille (Rumex acetosa) et la renoncule rampante (Ranunuculus repens), et
d'autre part des espèces témoignant de l'état actuel d'abandon: la grande ortie (Urtica
dioica), le gaillet gratteron (Galium aparine) et les massifs denses de ronciers (Rubus
sp.) qui se développent à partir de la lisière forestière.
C'est d'ailleurs la proximité du bois qui permet un envahissement rapide d'espèces
ligneuses: le sorbier des oiseleurs (Sorbus aucuparia), l'aubépine à un style
(Cratageguus maonagynau), le peuplier tremble (Populus tremuula) et même le chêne
pédonculé (Quuercuus roobuur) qui annoncent l'évolution vers un stade préforestier.
Sr: friche rudérale
Sr + Sz: idem en mosaïque avec des recrus divers
Sr + Sg: idem en mosaïque avec des fourrés de genêt à
balais
La partie autrefois excavée du site (exploitation de sable) est à présent
envahie d'une végétation de hautes herbes de friches rudérales comme le millepertuis
commun ( Hypericuum perforatum), la verge d'or du Canada (Solidago gigantea), la tanaisie
(Tanacetuum vuulgare) et l'armoise (Artemisia vulgaris). Il y a peu de nitrophiles.
Les friches les plus récentes se marquent par le maintien du tussilage (Tussilago
farfara), espèce pionnière fixatrice des terres meubles.
Une végétation arbustive se développe aussi: il s'agit en grande partie d'espèces
héliophiles comme le saule blanc (Salix alba) et le saule marsault (Salix caprea), le
robinier (Robinia pseudacacia) et le buddleia (Buddleia davidii) qui est très abondant.
Le stade suivant de la colonisation forestière se remarque aussi avec l'apparition de
l'aubépine (Crataegus monogyna), du cornouiller sanguin (Cornus sanguinea) et même du
chêne pédonculé (Quercus robur).
Sur les sols plus filtrants, le premier stade de la recolonisation est constitué par le
fourré de genêt à balais (Sarothamnus scoparius) (Sg). Outre cette espèce, on note la
grande abondance du buddleia (Buddleia davidii), une autre essence tolérant assez bien la
xéricité du milieu.
Sz: recrus divers
K j + Sz: verger envahi de recrus divers
Dans la partie nord du site, les ligneux constituent des fourrés denses qui se
sont développés aux dépens de la strate herbacée. On y trouve des espèces
pionnières: le saule blanc (Salix alba), le genêt à balais (Sarothamnus scoparius) et
le robinier (Robinia pseudacacia).
A proximité, un verger de griottier (Prunus cerasus) à l'abandon est envahi de
cornouiller sanguin (Cornus sanguinea).
Bp: potagers
Ils sont situés au nord le long de l'avenue Dolez.
Kh: haie
Elle est localisée le long de l'avenue Dolez et comprend comme espèces
principales: l'érable sycomore (Acer pseudoplatanus), le sureau noir (Sambucus nigra),
l'orme (Ulmuus. campestris) et le frêne (Fraxinus excelsior).
Kb/Kt: alignement d'arbres sur talus
L'alignement d'arbres qui longe la prairie de l'avenue Dolez a un intérêt
paysager indéniable. Un autre petit alignement est situé plus au nord. Dans les deux
cas, les arbres plantés sont des peupliers d'Italie (Populus nigra ssp. pyramidaliss).
Sous ces arbres, on trouve des massifs hétérogènes de bouleaux verruqueux (Betuula
penduula), d'épicéas (Picea abies), et de saules (Salix caprea et Salix alba).
Kc: carrière
Cette ancienne carrière est reconvertie en dépôt de ferrailles et de matériaux
de construction.
Evaluation biologique-écologique
Nous reprenons ici les données exposées dans le document
I.B.G.E. de 1990 (dossier d'acquisition).
La carte n°9 que nous présentons est la réplique en noir et
blanc de la carte couleur publiée dans ce document et a été établie à partir de
données floristiques.
Comme dit plus haut, l'intérêt écologique réside essentiellement dans la présence
simultanée de divers stades de la succession végétale correspondant à un substrat
sablonneux sec. Les grandes friches arbustives ouvertes offrent certainement une
diversité entomologique importante; elles ne demandent qu'à être explorées.
Aucune parcelle ne présente de qualité écologique
suffisante justifiant l'octroi d'une valeur exceptionnelle ou très élevée. Les degrés
de valeur biologique représentés sont les suivants:
- les zones de valeur moyenne à élevée comportent notamment la peupleraie
mélangée à orchidée (Epipactis helleborine), l'alignement d'arbres qui borde la
prairie pâturée, certaines friches arbustives, la haie vive le long de l'avenue Dolez et
les buissons isolés dans la prairie pâturée;
- les zones de valeur faible à moyenne comportent certains bois de recolonisation
et certaines friches arbustives, la prairie pâturée et le vieux verger;
- les zones de valeur nulle à faible comportent les friches dégradées dans le
nord du site, les potagers, l'ancienne carrière et les quelques baraquements.
Carte d'affectation et propositions concrètes de
gestion
A partir des cartes précédentes, nous avons élaboré une
carte d'affectation (carte n°10 calquée sur le modèle de la
carte d'affectation du Kauwberg I (carte n°5). Cette carte
reprend également les propositions de gestion concrètes (numérotées de 23 à 26).
Propositions de gestion
- 23: les potagers doivent être maintenus et
éventuellement étendus en empiétant légèrement sur la prairie à chevaux.
Malheureusement, ces petits potagers sont moins faciles à surveiller et l'occupant actuel
se plaint d'actes répétés de vandalisme.
- 24: l'ancien verger à griottiers pourrait
faire l'objet d'une réaffectation. Pour cela il suffirait de couper tous les cornouillers
qui sont entrés en compétition avec les cerisiers.
- 25: Dans les Quatre zones désignées, il
serait nécessaire d'opérer des tailles et des débroussaillages réguliers (chaque
hiver), de manière à garder une structure de végétation ouverte: cette opération
serait favorable au maintien d'une diversité végétale élevée, et permettrait aussi le
maintien ou même le développement d'une entomofaune intéressante. Effectué à une
certaine échelle, ceci pourrait également profiter à certaines espèces d'oiseaux comme
les différentes espèces de fauvettes.
- 26: à cet endroit, nous avons constaté des dépôts
clandestins de matières végétales (branchages, herbes,...) en quantité importante. Le
risque est grand s'il on ne fait rien de voir s'installer un véritable petit dépotoir
clandestin. Il faudrait fermer cet accès étroit par la pose d'une clôture solide et
d'une pancarte interdisant de jeter des immondices.
D'autre part, il est évident que ce que nous avons dit à
propos du Kauwberg I concernant les prairies pâturées reste valable ici. La
présence d'animaux domestiques sur le site assure le maintien de vastes zones ouvertes,
joue un rôle éducatif et social, et est aussi bien sûr une activité de délassement
pour les propriétaires des animaux.
De plus, cette face du Kauwberg II, avec sa prairie et ses éléments de haie, son potager
et son superbe alignement de peupliers, offre une perspective incomparable à l'avenue
Dolez et constitue un ensemble avec le Kauwberg I qu'il serait très dommage de changer.