Les orthoptères
Nous avons choisi, dans les limites du temps qui nous était
imparti, de faire un recensement des orthoptères du Kauwberg. L'étude de ce groupe
d'arthropodes présentait en effet plusieurs avantages. D'abord, un recensement a déjà
été effectué sur le site en 1989 par DEVRIESE. Ensuite, la plupart des espèces sont
adultes en fin de saison, ce qui présentait un avantage certain pour nous. De plus, ce
groupe n'offre pas de gros problèmes d'identification. Enfin, certaines espèces
constituent de bons indicateurs de milieu. Les données présentées sont le fruit de
plusieurs visites effectuées entre le 25 août et le 30 septembre.
DEVRIESE avait trouvé six espèces sur le site: Chortippus parallelus, Chortippus
brunneus, Chortippus biguttulus, Tettigonia viridissima (la grande sauterelle verte),
Pholidoptera griseoaptera (la sauterelle des ronciers, 'bramesprinkhaan' en néérlandais)
et Tetrix undulata. Les trois espèces de Chortippus sont très communes en Belgique et il
n'est pas surprenant de les trouver ici. Il en va de même pour le petit Tetrix. Quant aux
deux espèces de sauterelles, bien que relativement communes dans la région bruxelloise,
elles témoignent cependant d'une diversité des milieux ouverts du Kauwberg.
Nous avons retrouvé quatre des six espèces recensées par DEVRIESE: Chortippus
parallelus (très abondant sur le site du Kauwberg I et II, notamment sur la pelouse
silicicole le long de l'avenue de la Chênaie), Chortippus brunneus (deux mâles dans les
potagers de l'Avenue Dolez), Tettigonia viridissima (bien présente également sur le
site, notamment dans la magnocariçaie près de la chaussée de St-Job) et Pholidoptera
griseoaptera (trouvée à aux moins trois endroits dont la pelouse silicicole et la
magnocariçaie, ainsi que dans la petite prairie à l'abandon du Kauwberg Il, contre
l'avenue Pastur). Les deux autres espèces mentionnées par DEVRIESE sont certainement
toujours présentes sur le site et seraient sans doute retrouvées grâce à des
recherches plus approfondies.
Nous avons par contre trouvé une nouvelle espèce pour le site: Conocephalus dorsalis,
deux femelles et un mâle. Cette belle sauterelle est intéressante puisqu'elle fréquente
essentiellement les zones humides et est donc un bon indicateur de milieu. Lors de
l'enquête de 1989, cette espèce semblait en expansion dans la région bruxelloise:
Monsieur Devriese nous l'a confirmé récemment et cette nouvelle donnée n'est donc pas
tout à fait surprenante. Notons que cette espèce pond ses oeufs dans des herbes hautes
(carex, ombellifères,...) et il est donc nécessaire lors des travaux de fauche
envisagés de laisser des zones refuges non fauchées si l'on veut garder cette belle
espèce sur le site.
Autres insectes
Pour les insectes, aucune autre étude suivie n'a été
réalisée jusqu'à présent à notre connaissance. Quelques espèces de lépidoptères et
d'odonates (libellules) ont été notées sur le site par divers observateurs. Dans le
premier groupe, citons la piéride du chou (Pieris brassicae) espèce très commune, le
procris (Coenonympha pamphiluus), espèce typique des prairies et l'argus bleu (Lycaena
icanes) commun sur le site de mai à octobre. Nous avons nous-mêmes été témoins de
l'abondance de deux espèces de papillons migrateurs sur le plateau au début du mois de
septembre: le vulcain (Vanessa atalanta) et le lambda (Autographa gamma). Il n'est pas
impossible que le Kauwberg constituent pour ces deux espèces un relais migratoire de
choix en région bruxelloise, notamment par son altitude.
Dans le second groupe, nous avons observé quelques exemplaires adultes de la grande
libellule Aeshna cyaenea (espèce commune) volant sur le site ainsi que de nombreuses
larves d'un Aeshnidae qui appartiennent probablement à cette même espèce, dans la mare
recreusée de l'avenue Dolez. Dans cette mare nous avons également trouvé de nombreuses
larves d'un Coenagrion non identifiable.
Cette mare accueille d'autres insectes inféodés aux milieux aquatiques: nous avons
relevés diverses espèces de dytiques et une espèce d'hydromètre (Hydrometra sp.).
Lors de notre travail, deux personnes se sont proposées
spontanément pour effectuer à l'avenir divers relevés entomologiques sur le site et
même pour organiser des excursions rassemblant quelques spécialistes de l'entomofaune.
Cette occasion doit certainement être saisie! Il s'agit d'une part de Monsieur Hubert
Bruge, ancien chef de travaux à l'ULB et spécialistes des coléoptères staphylins, et
de Monsieur Marc Dufrêne du Laboratoire d'Ecologie et de Biogéographie de
Louvain-La-Neuve qui propose de faire des excursions avec des étudiants de zoologie.
Les arachnides
Les araignées vraies (Araneae) constituent un groupe
zoologique riche en espèces et aux préférences écologiques souvent bien définies.
L'étude de l'aranéofaune d'un site déterminé reflète donc bien sa richesse et sa
diversité en biotopes (et microbiotopes). Nous devons toutes les données présentées
ici pour le Kauwberg aux investigations de Monsieur R. Kekenbosch qui a bien voulu nous
fournir ces renseignements avant leur publication officielle dans la revue Arabel
(KEKENBOSCH, à paraître ).
Les données résultent de captures effectuées entre 1981 et 1993 sur le Kauwberg à
l'aide de pièges mais aussi par capture directe. Il s'agit bien sûr, comme pour les
autres groupes étudiés, d'une liste non-exhaustive et susceptible d'être enrichie par
de nouvelles observations. Au total 133 espèces ont été capturées et identifiées
(l'aranéofaune belge compte près de 700 espèces) réparties en 21 familles: la liste
complète de ces espèces est reprise en annexe.
Comme le signale M. Kekenbosch, dix espèces sont particulièrement dignes d'intérêt
dans le cadre régional bruxe1lois et même au plan national. La plupart d'entre elles
sont des espèces fortement liées aux zones humides ombragées. Elles ont été
capturées dans la saulaie/aulnaie bordant l'ancien étang, le long de la chaussée de
Saint-Job. Il s'agit de: Lathys humilis, Theridion instabile, Ceratinella brevis,
Ceratinella scabrosa, Saloca diceros, Agyneta conigera et Agyneta ramosa. Parmi les trois
autres espèces dignes d'être mentionnées épinglons Pardosa palustris et Synageles
venator (la dixième espèce est Enoplognatha latimana).
Pardosa palustris fut capturée au début des années 80 dans la 'lande à genêts' près
de l'avenue de la Chênaie, mais semble avoir disparu probablement en raison de l'absence
de fauche et du reboisement progressif. Il est intéressant de signaler que d'autres
espèces plus communes également inféodées aux prairies riches en espèces végétales
semblent en régression pour les mêmes raisons: c'est le cas pour Alopecosa pulverulenta,
Trochosa terricola, Tegenaria agrestis, Histopona torpida et Troxochrus scabriculus.
Synageles venator, est une espèce qui fréquente des endroits pauvres en végétation,
bien ensoleillés et qui a été capturée près du vieux pommier en amont de la zone
marécageuse. Il est probable que cette espèce témoigne d'un passé assez récent où
les alentours de la carrière étaient beaucoup plus dégagés ce qui permettait à cette
belle espèce de se reproduire. Il n'est pas sûr qu'elle survivra longtemps encore si on
ne fait rien pour réaménager les alentours de la carrière.
Cinq espèces qui n'ont pas été capturées sur le site
même et qui ne sont donc pas reprises dans la liste en annexe doivent être mentionnées.
Il s'agit de 5 espèces vivant dans des lieux bien exposés, à végétation peu abondante
et qui soit sont présentes à proximité du site, soit semblent avoir disparues de la
région bruxelloise mais qui seraient susceptibles de se réinstaller. Dans le premier
groupe, on trouve Xerolycosa miniata, Xerolycosa nemoralis et Zodarion rubidum, toutes
trois présentes le long de la voie ferrée jouxtant le Kauwberg mais qui ne semblent -pas
(plus?) trouver sur le site même des conditions d'exposition idéales. Espèce rare pour
la Belgique et très rare pour la région bruxelloise, Arctosa perita a été capturée
récemment par M. Kekenbosch dans le haut de l'ancien cimetière d'Uccle. Cette espèce
pourrait sans doute aussi (re)coloniser le Kauwberg si les conditions d'habitat lui
devenaient favorables.
Enfin, la petite mygale, Atypus affinis, était présente à Uccle au début du siècle
mais ne semble plus y subsister. Bien qu'on la retrouve déjà en Brabant, le retour de
cette espèce à Bruxelles ne serait possible que si plusieurs sites bruxellois lui
étaient favorables (sablières notamment).
Mentionnons encore Piratapiraticus, capturée en 1986 dans
des petites dépressions humides au bord de l'ancien étang. Cette espèce préfère des
endroits humides bien dégagés et semble avoir disparu en raison de l'atterrissement de
la petite mare et de la hauteur de la végétation.
En résumé, pour garder une aranéofaune intéressante sur
le site, il faudrait prévoir dans le plan de gestion:
- de restaurer un élément de lande à bruyère sur les bords de la carrière,
- de faucher et de débroussailler régulièrement la 'lande à genêt,
- de réaménager la zone humide en prenant soin de garder une partie de la
saulaie/aulnaie bordant l'ancien étang.
Comme on pourra le constater, ces trois suggestions s'accordent parfaitement avec les
propositions de gestion découlant de l'étude de la flore et de la végétation. De plus,
ces suggestions seraient également favorables à de nombreux groupes d'insectes (v.
propositions de gestion).